Manganèse : L’ex-patron de Comilog confiant sur la capacité du Gabon à transformer localement sa production d’ici 2029

Invité de l’émission « L’entretien » ce mercredi sur la télévision publique gabonaise, Marcel Abéke, ancien ministre du Pétrole et ex-administrateur directeur général de la Compagnie minière de l’Ogooué (Comilog, filiale d’Eramet), a affiché un enthousiasme sans équivoque sur la volonté du Gabon de transformer localement, d’ici 2029, l’ensemble de sa production de manganèse. Cette ambition, portée par les autorités gabonaises dont le nouveau président Brice Clotaire Oligui Nguema, suscite pourtant des critiques du principal opérateur du secteur, Eramet, qui met en avant des obstacles techniques et énergétiques.

Une idée ancienne, un engagement renouvelé
Pour Marcel Abéke, la vision de transformer localement les ressources minières du Gabon n’est pas nouvelle. Elle remonte aux années 1970, sous l’impulsion du président Omar Bongo, qui souhaitait déjà valoriser le manganèse sur place plutôt que de l’exporter à l’état brut.
L’intégralité de cette émission télé de mercredi
Cette ambition s’est progressivement concrétisée avec la mise en place du Complexe métallurgique de Moanda (C2M), inauguré en 2015, qui produit aujourd’hui du silico-manganèse. Abéke rappelle que cette politique a été constamment réaffirmée par les différents chefs d’État gabonais, de la construction du chemin de fer à l’industrialisation progressive du secteur.
Un optimisme assumé
Interrogé sur les inquiétudes d’Eramet concernant la faisabilité technique et énergétique d’une transformation locale à grande échelle, Marcel Abéke balaie les doutes : « Il n’y a pas de raison particulière de s’inquiéter sur la capacité d’un pays comme le Gabon à mobiliser les moyens nécessaires ». Il insiste sur la volonté politique et la souveraineté du Gabon pour mener à bien ce projet, tout en reconnaissant que la montée en puissance de la transformation sera progressive, en fonction de la capacité énergétique disponible et des investissements réalisés.
Abéke rappelle que le barrage hydroélectrique de Grand Poubara, conçu pour accompagner l’industrialisation minière, dispose d’un potentiel énergétique suffisant (jusqu’à 280 MW) pour soutenir l’expansion des usines de transformation, non seulement pour Comilog, mais aussi pour d’autres opérateurs du secteur comme Nouvelle Gabon Mining (NGM) et des groupes chinois. Il souligne également l’importance de la formation, avec la création d’une école des mines et de la métallurgie à Moanda, destinée à doter le pays d’une main-d’œuvre qualifiée.
Réponse aux critiques d’Eramet
La présidente du conseil d’administration d’Eramet, Christel Borès, a déclaré le 16 juin dernier dans une interview que « transformer localement le manganèse reviendrait à mettre au Gabon deux fois la capacité de transformation de l’Europe ». Pour Marcel Abéke, cette affirmation relève d’une mauvaise interprétation : il ne s’agit pas de transformer immédiatement les 10 millions de tonnes produites chaque année, mais de progresser par étapes, en réduisant progressivement les exportations de minerai brut au profit de produits à forte valeur ajoutée.
Abéke estime que les réticences des opérateurs sont « malvenues » et qu’il s’agit avant tout d’une question de volonté politique et industrielle. Il invite les partenaires à s’associer pour relever ce défi, rappelant que des montages financiers, y compris avec des partenaires internationaux comme EximBank et la Chine, ont déjà permis de concrétiser des projets similaires par le passé.
Valorisation, emploi et souveraineté
Pour l’ancien ministre, la transformation locale du manganèse est un enjeu de souveraineté, de création de valeur et d’emplois pour le Gabon. Il insiste sur le fait que la valeur ajoutée doit rester dans le pays, au bénéfice de l’économie nationale et des jeunes ingénieurs gabonais formés pour relever ce défi industriel. Il conclut en affirmant que le Gabon n’a pas à se laisser imposer des conditions déraisonnables par les partenaires étrangers, et que la réussite de ce projet dépendra avant tout de la détermination collective et de la mobilisation des ressources nationales.
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